Missak Manouchian au Panthéon, un hommage national à un « français de préférence »

Direction : Ministère des Armées / Publié le : 21 février 2024

Le mercredi 21 février, 80 ans jour pour jour après sa mort, Missak Manouchian est entré au Panthéon accompagné de son épouse Mélinée. La veille, son cercueil était accueilli pour une procession mémorielle au Mont-Valérien, lieu de son exécution. Retour sur un hommage national pour saluer le parcours d’un résistant arménien « mort pour la France ».

Avant le Panthéon, Missak Manouchian honoré au Mont-Valérien, le 20 février 2024. © Florian Szyjka / Ministère des Armées

« Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. » Les mots de Missak Manouchian résonnent dans la clairière des fusillés. Ces mots, il les a écrits à son épouse Mélinée, deux heures avant d’être exécuté par les nazis au Mont-Valérien, le 21 février 1944, avec 21 de ses frères d’armes.

Ce mardi 20 février, 80 ans après, l’heure était au recueillement pour les porte-drapeaux, les autorités présentes et l’assemblée d’anonymes, réunis sur les hauteurs de Suresnes, au Mont-Valérien, pour une procession mémorielle en hommage au résistant arménien. À la veille de sa panthéonisation, son cercueil a emprunté le chemin de ses derniers moments, de la chapelle à la clairière des fusillés. Sur son passage, des jeunes portent des lanternes, tandis que d’autres suivent le cortège de près. Ils tiennent dans leurs mains les photos des membres du « groupe Manouchian », eux aussi panthéonisés.

 « L’histoire de Missak Manouchian me touche particulièrement »

Cette « armée du crime », comme l’avait baptisé l’occupant nazi sur la célèbre Affiche rouge, était cosmopolite. Ils étaient 23 – juifs, polonais, hongrois, italiens, espagnols, roumains et français. Ensemble, ils combattirent la barbarie du Troisième Reich. Ensemble, ils furent traqués par les brigades spéciales de la police française jusqu’à leur arrestation. Et ensemble, ils périrent sous les balles allemandes. Celestino Alfonso, Olga Bancic, Joseph Boczor… Leurs noms sont lus à haute voix pour faire résonner la mémoire de leur sacrifice. « C’est un hommage magnifique », salue Sarah, présente dans l’assistance. « Étant moi-même née à l’étranger, l’histoire de Missak Manouchian me touche particulièrement. Comme lui, j’ai choisi la France », poursuit-elle.

Le cercueil, recouvert d’un drapeau français, est ensuite transporté sur l’esplanade du Mémorial de la France combattante. Devant l’imposante croix de Lorraine ornée de la phrase du général de Gaulle, « Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance ne s’éteindra pas », 96 personnalités se relaient durant deux heures auprès du cercueil. Parmi elles, des membres du Gouvernement, des élus, le chef d’état-major, des familles de résistants. Plus tard dans la nuit, des dizaines d’anonymes viennent également rendre un hommage silencieux, sincère et émouvant, à ce héros de l’ombre.

La dépouille est ensuite transférée dans la crypte, afin que Missak Manouchian y repose pour la nuit en compagnie des 17 représentants de la France combattante qui y sont inhumés.

La reconnaissance de tous les résistants étrangers

Le mercredi 21 février, la dépouille de Missak Manouchian quitte le Mont-Valérien pour rejoindre la capitale. S’ouvre alors une cérémonie présidée par le Président de la République, Emmanuel Macron. Le cercueil du résistant, couvert d’un drapeau français, est installé aux cotés de celui de son épouse Mélinée. Sous une pluie fine, l’artiste Rostom Kachikian interprète au duduk (hautbois arménien) Un rêve à l’horizon. S’ensuit la lecture, par Patrick Bruel, de la lettre d’adieu de Manouchian, adressée à son épouse le jour de sa mort. Les noms de ses frères d’armes sont ensuite égrenés tandis que leurs portraits sont disposés autour des deux dépouilles.

Face à l’imposant mausolée abritant les grandes figures de la République, les trois grands chapitres de sa vie sont honorés : le génocide arménien, l’arrivée en France et l’engagement dans la Résistance. Les mots de Louis Aragon, ses « Strophes pour se souvenir », mis en musique par Léo Ferré et repris pour l’occasion par le groupe Feu ! Chatterton, résonnent devant le monument.

A la nuit tombée, les deux cercueils entrent au Panthéon, portés par des soldats de la Légion étrangère.

La cérémonie s’achève par un discours d’Emmanuel Macron. Reprenant les mots d’Aragon, le chef de l’état salue « ces Français de préférence, Français d’espérance ». Ces mots se veulent tout un symbole. À l’instar de Missak Manouchian, de nombreux combattants étrangers sont « morts pour la France ». L’entrée au Panthéon du résistant arménien et de ses compagnons d’armes leur offre, à tous, la reconnaissance qu’ils méritent.

Missak Manouchian et son épouse Mélinée rejoignent ainsi Jean Moulin et d’autres grandes figures de la Résistance. Ils sont placés dans le caveau numéro 13, où reposent la résistante Joséphine Baker et l’écrivain Maurice Genevoix. À l’entrée, une plaque est installée en l’honneur des membres du groupe Manouchian, pour marquer leur entrée symbolique au Panthéon*.

*Les 21 camarades de Missak Manouchian fusillés avec lui le 21 février, complétés de Joseph Epstein, chef du groupe fusillé en avril 1944, et de Golda Bancic, guillotinée à Stuttgart en mai 1944.

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