L’histoire du sport dans les armées

C’est à la suite d’une pratique intensive du sport lors d’un voyage en Angleterre que Louis Napoléon Bonaparte impose au début du XIXe siècle « d’éduquer physiquement » les militaires. La notion d’exercice physique devient synonyme d’une armée saine, vigoureuse et résistante. L’athlète, comme le soldat, doit être prêt psychologiquement et physiquement à l’épreuve qui l’attend. Si les risques encourus ne sont pas les mêmes, leur choix de vie exigeant mêle rigueur et sacrifice.

Joinville-le-Pont (Seine). Ecole normale militaire de gymnastique. La montée aux échelles. © Amédée Eywinger/ECPAD/Défense

Du fait de cette proximité si particulière avec le sport, les armées vont devenir pionnières dans ce domaine, un acteur majeur du développement de la pratique sportive de compétition et de loisirs pour tous.

A l’issue de la seconde Guerre Mondiale, l’entraînement physique, militaire et sportif (EPMS) devient une priorité dans la formation des cadres des armées. Le sport devient un outil essentiel de la préparation opérationnelle des militaires pour, d’une part, maintenir leur condition physique et psychologique et être pleinement efficace dans l’accomplissement de leurs missions, d’autre part pour entretenir l’esprit de corps et le dépassement de soi.

En 1948, la compétition militaire sous forme de championnats et de jeux militaires émerge sous l’impulsion de la France qui fonde avec quelques pays européens le conseil international du sport militaire (CISM). Le CISM est aujourd’hui l’une des plus grandes organisations multidisciplinaires regroupant près de 140 pays à travers le monde entier, l’équivalent du Comité international olympique (CIO) pour toutes les armées du monde.

Les armées importent des disciplines dans le sport de haut niveau international. L’équitation et plus particulièrement le concours complet (triathlon équestre combinant dressage, cross et saut d’obstacles) est une discipline d’origine militaire qui avait pour objectif de tester les capacités des chevaux destinés aux forces armées.

Le concours complet, en équitation, est une discipline d’origine militaire. © Marc Flament/ECPAD/Défense

Après plusieurs fermetures et restructurations, l’Ecole de Joinville est recréée en 1956 sous la forme du bataillon de Joinville. Il l’élite des sportifs français en âge de faire leur service militaire, obligatoire à l’époque, afin de leur éviter une trop longue coupure dans leur carrière sportive. 450 athlètes de haut niveau français y font leur service national tous les ans. Les connaissances et la pratique du sport sont diffusées parmi les jeunes qui, de retour de leur service militaire, les diffusent au sein de la population, chacun dans sa région d’appartenance.

Le ministère des Armées favorise l’échange de valeurs entre les armées et toutes les catégories sociales de citoyens, dont prioritairement les plus jeunes. Dès 1959, l’union fédérale des clubs de la défense nationale et des forces armées aujourd’hui fédération des clubs de la défense (FCD), accueille dans ses clubs l’ensemble de la communauté de défense (militaires, personnels civils du ministère et leurs familles) et les personnes extérieures à la défense, afin de leur donner le goût de la pratique des activités sportives et culturelles, des loisirs à la compétition, et maintenir leur condition physique et morale. Depuis 1993, elle est agréée par le ministère des Sports avec lequel elle prend part à la mise en œuvre des différentes politiques publiques (féminisation, insertion, handicap, santé par le sport, diversité, mixité) et membre du comité national Olympique et sportif français (CNOSF).

En 1960, les athlètes français reviennent des Jeux Olympiques de Rome sans avoir décroché de médailles d’or. Le général De Gaulle décide alors d’entreprendre une politique sportive d’ampleur. « Si la France brille à l’étranger par ses penseurs, ses savants, ses artistes, elle doit aussi rayonner par ses sportifs. Un pays doit être grand par la qualité de sa jeunesse et on ne saurait concevoir cette jeunesse sans un idéal sportif ». Maurice Herzog, alors à la tête de haut-commissaire aux Sports puis secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports jusqu’en 1965 élabore une politique aux sports ambitieuse avec un volet militaire.

Les années 1967-1998 voient la fusion du bataillon de Joinville qui s’adresse aux appelés sportifs de haut niveau et du bataillon d’Antibes qui forme des spécialistes militaires des sports au sein de l’Ecole interarmées des sports (EIS) à Fontainebleau. Dans ces installations sont aussi regroupées l’Ecole d’entraînement physique militaire d’Antibes pour l’armée de Terre, le centre d’éducation physique et des sports de Toulon pour la Marine nationale et le groupement sportif interarmées de Joinville.

Roger Lemerre, sélectionneur adjoint puis sélectionneur de l'équipe de France de football. © Capture d'écran

Roger Lemerre devant des sportifs du bataillon de Joinville. Sélectionneur adjoint de l'équipe de France de football championne du Monde en 1998 puis sélectionneur de l'équipe championne d'Europe en 2000, il a été responsable du bataillon de Joinville et entraîneur de l’équipe de France militaire qui sera championne du monde en 1995.

Roger Lemerre devant des sportifs du bataillon de Joinville. Sélectionneur adjoint de l'équipe de France de football championne du Monde en 1998 puis sélectionneur de l'équipe championne d'Europe en 2000, il a été responsable du bataillon de Joinville et entraîneur de l’équipe de France militaire qui sera championne du monde en 1995.

A compter de 1996, la suspension du service militaire, la professionnalisation des armées et la nouvelle politique interministérielle des sports conduisent à rénover le modèle de soutien des forces armées au sport de haut niveau, et à développer de nouvelles relations avec le mouvement sportif et le ministère des Sports, notamment dans les secteurs de l’innovation, de la recherche, du développement et du handicap.

En 2002, le mythique Bataillon de Joinville, qui a accueilli plus de 21 000 athlètes en 45 ans et remporté plus de 45 médailles olympiques, 312 titres mondiaux ou militaires et 952 titres nationaux ou internationaux, disparaît. Le bataillon d’Antibes conserve la mission principale de former le personnel sportif nécessaire à la pratique de l’enseignement physique au sein des trois armées et de la gendarmerie.

En 2003 et 2014, des accords-cadres interministériels entre le ministère des Armées et le ministère des Sports visent à développer le sport de masse et celui de haut niveau au sein des armées. Ainsi naît en 2006, le Centre national des sports de la Défense (cnsd), issu de la longue lignée des organismes de formation et de performance du sport. Il est chargé de mettre en œuvre la politique du ministère des Armées en matière de sports : l’optimisation des capacités physiques et mentales des militaires à l’engagement opérationnel, le soutien au sport de haut niveau, la reconstruction des blessés militaires par le sport…

Le ministère des Armées mène depuis de nombreuses années une politique active d’aide des sportifs de haut niveau en situation de handicap. Depuis 1966, le cercle sportif de l'institution nationale des Invalides (CSINI), labellisé par le ministère des Armées, accompagne des personnes invalides dans leur reconstruction et leur réinsertion en leur permettant de pratiquer différents sports en loisir et en compétition.

En 2014, le Bataillon de Joinville est réactivé. Ses athlètes sont regroupés sous l’appellation « Armée de Champions ». Leur gestion repose sur une gouvernance interministérielle placée sous la responsabilité du CNSD, visant à accompagner ces sportifs vers la haute performance sportive, tout en assurant un suivi socio-professionnel et en les initiant aux valeurs des forces armées.

Signature du mur des champions par les sportifs de haut niveau de la défense au CNSD © CNSD

Aujourd'hui, le CNSD est membre du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), membre du Comité paralympique du sport français (CPSF) et de l'Agence nationale des sports. Il est aussi membre du réseau grand INSEP (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) et participe à ce titre à la préparation de l’ensemble des sportifs français pour les Jeux Olympiques et Paralympiques, en offrant des conditions d’entrainement optimales aux athlètes : accueil et mise à disposition des infrastructures et des savoir-faire, optimisation des ressources des forces armées (ORFA), aguerrissement, cohésion, soutien et recherche médicale... Aujourd'hui, ce sont vingt-trois fédérations olympiques et paralympiques qui bénéficient de ce soutien.

L'entrée du CNSD © CNSD

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