Origines

Né de la Première guerre mondiale où se sont révélés les enjeux des approvisionnements pétroliers pour des Forces mécanisées, le Service de l’énergie opérationnelle (SEO) est devenu au fil des décennies l'unique organisme du Ministère des Armées chargé du soutien pétrolier de l'ensemble des Forces armées, en métropole, en OPEX et partout où des unités sont stationnées ou font escale.

Service des essences © ECPAD

Connaitre ses racines c'est assurer son avenir, ou du moins tirer partie des expériences bonnes ou mauvaises. C'est d'autant plus vrai pour un service jeune, comme le SEO.

Plus jamais ça ! ". C'est, selon la tradition orale, ce qu'aurait dit le colonel de Gaulle lorsqu'il dut arrêter, faute de carburant, l'avance de ses blindés, à la bataille de Montcornet, alors qu'à quelques kilomètres un train complet d'essence affrété par le Service des poudres attendait d'être distribué par les Services de l'artillerie.

Cet événement dramatique était la conséquence directe du manque d'unité de commandement qui avait caractérisé, depuis sa naissance pendant la guerre de 1914, l'organisation du soutien pétrolier des armées françaises.

Ne soupçonnant pas en effet à cette époque l'ampleur et la difficulté des problèmes de ravitaillement pétrolier les états-majors avaient raccroché, d'une part, l'approvisionnement général des carburants à la chaîne logistique mise en place par l'intendance militaire, d'autre part, leur distribution au Service automobile.

Après la guerre, la Direction des poudres, qui importait déjà des produits pétroliers pour la fabrication de certains explosifs, se substitua au service de l'Intendance et réalisa sur tout le territoire national et en Afrique du Nord de vastes entrepôts (centre d'importation et usine d'huiles à La Pallice, centre de ravitaillement de La Courneuve, Gergy, Rouen, etc.), le ravitaillement direct des forces étant confié aux parcs d'artillerie.

Ce système de double responsabilité, dépendant lui-même, pour l'affectation des ressources en produits pétroliers, de la Direction des carburants du ministère des Travaux publics et de la Société pour l'importation des pétroles et dérivés (SIPD) montra très rapidement ses limites et, par la loi du 25 novembre 1940, fut créé, sous l'autorité unique du Directeur central de l'intendance maritime, un organisme intégré qui recevait pour la première fois l'appellation de Service des essences des armées (SEA), sous les ordres du Commissaire en chef de La Barrière. L'articulation des moyens se présentait avec une direction centrale à Chamalières, un groupe de ravitaillement en essences du Nord à Paris (GREN), un groupe de ravitaillement en essences du Sud à Marseille (GRES), un autre en Afrique du Nord, à Alger (GREAN) et un dernier à Beyrouth pour le Levant et à Dakar pour l'Afrique occidentale française (AOF).

Lors de l'occupation de la zone libre, et à l'issue de la dissolution de l'armée de l'armistice (le 29 novembre 1942), le SEA fut transféré à Paris sous la dénomination de "Service des essences de l'État", à titre de service extérieur de la Direction des carburants.

Par ailleurs, en Afrique du Nord, à l'issue de la campagne de Tunisie, le groupe de ravitaillement en essences d'Afrique du Nord fut transformé en janvier 1943 en "Direction Générale du SEA" rattachée au département de la guerre. Étaient créées parallèlement trois directions régionales : Algérie, Tunisie et Maroc. En prévision des opérations-futures, outre l'approvisionnement, le problème majeur de la nouvelle Direction générale du SEA était de constituer des unités " essences " destinées à soutenir le Corps expéditionnaire français. Il fallait définir le système logistique à utiliser, trouver les ressources humaines nécessaires et former dans un temps très court des unités instruites et cohérentes.

Les premières unités créées, provenant des 26e et 27e régiments du Train, furent chargées de l'exploitation des dépôts. Puis, entre juillet 1943 et avril 1944, neuf autres unités furent mises sur pied : quatre compagnies de ravitaillement en essence (CRE) destinées au transport de produit, quatre compagnies de ravitaillement et d'exploitation d'essence (CREE) qui, en plus de la fonction transport, étaient en mesure d'assurer la gestion et l'exploitation de dépôts importants, une compagnie de distribution de carburant dont la mission était aussi de construire et d'exploiter les oléoducs et les réservoirs de campagne. Ces unités participèrent aux campagnes d'Italie, de France et d'Allemagne, et aux opérations de Corse et de l'île d'Elbe. Lors de la campagne de France, la fusion du Service des Essences métropolitain et de la Direction générale venant d'Alger se fit très rapidement, sous l'autorité de l'Ingénieur en chef Vieux, secondé par le Commissaire R. Labbe, afin de concentrer les efforts pour le soutien des forces engagées. Que ce soit lors de l'opération Dragoon sur les côtes de Provence, à laquelle participèrent les premiers éléments du SEA, pendant la remontée du couloir rhodanien, lors de la trouée de Belfort, pour la défense de Strasbourg ou durant la campagne d'Allemagne, la tâche du Service des essences a été rude, compte tenu du tonnage à distribuer chaque jour (800 tonnes) et de la complexité des transports. C'est ce que le général de Lattre de Tassigny a su reconnaître dans un ordre du jour daté du 16 juin 1945.

La réunification du service fut consacrée par l'ordonnance du 17 mars 1945, dont la physionomie peut être résumée de la façon suivante : c'est un service militaire commun chargé de ravitailler en tous lieux l'ensemble des forces militaires du pays. C'est aussi un service technique capable de conseiller le commandement dans le domaine pétrolier, et qui reçoit, stocke, transporte et distribue les produits pétroliers nécessaires aux armées. C'est enfin un service industriel qui a le souci du rapport coût-efficacité. Dans un but d'économie, son organisation fut conçue de façon concentrée. Elle ne comporte que trois directions territoriales, l'une au Nord, l'autre au Sud et la troisième en Afrique du Nord.

Si l'ordonnance du 17 mars 1945 portant rattachement du SEA au ministère de la Guerre consacrait bien la position interministérielle du service, et si elle donnait bien une bonne définition de sa mission générale, elle n'en comportait pas moins une grave lacune en restant muette sur les aspects militaires de sa mission (mobilisation, adaptation des unités à leurs missions, structures et moyens du temps de guerre).

Les difficultés qui en résultèrent conduisirent quinze ans plus tard, avec le décret du 21 novembre 1960, à une réorganisation de l'implantation territoriale du SEA, pour faire cadrer celle-ci avec le découpage du territoire national en régions militaires. Par ailleurs, deux directions d'armée furent créées : celle des essences des troupes d'occupation en Allemagne, qui prit la relève de la direction des essences de la 1" armée en octobre 1945 et qui devint, en 1955, la Direction des essences des forces françaises en Allemagne (DEFFA) quand cessa le régime d'occupation.
Enfin, la Direction des essences des troupes en opération en Indochine, qui prit ultérieurement le nom de Direction des essences en Extrême-Orient. À la fin de la période 1945-60, le SEA se voyait amené à assurer de nouvelles responsabilités : l'exploitation partielle du réseau des oléoducs OTAN installés en France ; la prise en charge au début de 1960, sur la demande de l'armée de l'Air, du ravitaillement bord avion de sept bases aériennes. Ces deux nouvelles missions conféraient au service une compétence générale pour l'ensemble des problèmes militaires pétroliers. Cette période fut également consacrée, d'une part, à la reconstruction des dépôts endommagés tant en 1940 que lors des bombardements alliés, d'autre part à la création de nouveaux établissements, permettant ainsi d'accroître les capacités de stockage militaire.
Cette opération était devenue indispensable compte tenu de la création de l'Alliance atlantique pour faire face à l'évolution inquiétante de la situation internationale et du redéploiement des unités de l'armée de Terre. En-dehors de cette activité déployée pour réorganiser et développer les moyens du service, celui-ci s'est adapté aux nouvelles conditions d'approvisionnement et de distribution des produits, conséquence de l'évolution des matériels et en particulier de l'aviation à réaction, mais aussi de l'incidence de la normalisation OTAN. C'est ainsi que le SEA s'est orienté vers des fabrications par ses propres moyens de lubrifiants selon les spécificités propres au SEA.

Au cours des trente-quatre années qui couvrent cette nouvelle période, le SEA a connu différentes phases d'évolution, parfois contradictoires.

En effet, son efficacité et sa compétence parfaitement reconnues et appréciées par les utilisateurs l'ont conduit à élargir son champ d'activité à la quasi-totalité des opérations militaires pétrolières, les pouvoirs publics n'hésitant pas, en outre, à le mettre à contribution pour des tâches du domaine civil (dépannages d'hiver en montagne ou en cas d'incendies de forêts, assistance dans le cadre du plan POLMAR - pollution maritime, etc.). En revanche, il aura à connaître des "attaques" visant à diminuer ses moyens ou de limiter son domaine de compétence, ou encore à le supprimer purement en transférant ses, attributions à d'autres organismes civils ou militaires.
À partir de 1963, le SEA élargit son champ d'activité et s'adapte aux nouvelles hypothèses stratégiques. Le 27 novembre de cette année-là, une "antenne du SEA " est créée afin d'assurer le soutien du Centre d'expérimentation du Pacifique. C'est également en ce début de décennie que le SEA participe à l'exploitation des oléoducs OTAN installés sur le territoire national. De plus, il prend en charge progressivement les ravitaillements bord avion de l'armée de l'Air puis, à partir de 1977, de l'Aéronavale.
Début 1979, le SEA a enfin acquis une position d'équilibre qui s'est maintenue pendant la décennie suivante. Pendant cette période, il s'attachera à perfectionner et moderniser ses moyens de travail.
En 1987, le SEA a de nouveau été mis sur la sellette par une décision du ministre de la Défense de l'époque visant à commanditer une enquête sur la possibilité d'un démantèlement du SEA. Au cours de cette étude, le SEA fut vivement défendu par les états-majors "clients", qui reconnurent son efficacité et sa parfaite intégration aux forces. Moyennant quelques mesures afin d'améliorer le fonctionnement du service, la conclusion des rapporteurs fut qu'il convenait de conserver le SEA sous sa forme actuelle, en raison de l'impossibilité de garantir autrement les mêmes services, avec la même sécurité et à des coûts comparables à ceux de l'économie civile. Les textes d'organisation adoptés en 1991 réaffirment le caractère interarmées du service en lui permettant d'adopter une organisation territoriale conforme à cette vocation et en concordance avec le nouveau schéma du plan Armées 2 000. En février 1992, est élargi le champ de compétence du SEA, qui se voit confier la responsabilité de la mission " économies d'énergie " du ministère de la Défense.
Compte tenu de la nouvelle situation géopolitique internationale et des nouvelles hypothèses d'emploi des forces, le SEA d'aujourd'hui, comme il a su le faire par le passé, s'adapte aux circonstances dans le cadre d'un projet de service dont la finalité est de mieux servir les forces, en tous temps et en tous lieux.

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