D-STRESS : la réalité virtuelle au service de la détection du trouble de stress post-traumatique

Direction : AID / Publié le : 11 août 2022

Le dépistage du trouble de stress post traumatique (TSPT) le plus précocement possible est primordial pour mettre en place des stratégies de prise en charge limitant l’entrée dans la pathologie et réduisant le risque de chronicisation associé. Le projet D-Stress vise à mettre au point une nouvelle approche de dépistage en couplant le volet thérapeutique à l’intelligence artificielle.

La réalité virtuelle pour la détection du TSPT © James-Yarema - Unsplash

D-STRESS est porté par la start-up MyReve, qui développe des applications de réalité virtuelle couplées aux mesures physiologiques et appliquées aux peurs. Les recherches sont menées en partenariat avec les laboratoires LIP/PC2S de Chambéry, ainsi que CEDRIC et M2D2 du CNAM, l’IRBA et EMISSIVE, agence spécialisée dans les usages innovants des nouvelles technologies immersives.

Qu'est ce que le TSPT ?

Le TSPT peut être considéré comme une réponse de peur conditionnée (« anormale ») en lien avec une altération des capacités de régulation physiologique. Les symptômes cliniques sont :

  • Les reviviscences de l’événement traumatique (flash-back la journée ou la nuit) ;

  • L’évitement de tout ce qui peut rappeler l’événement traumatique (comme le lieu par exemple) ;

  • L’hyperactivité neuro végétative (impression d’être sur le « qui vive » en permanence avec réaction de sursaut au moindre bruit par exemple) ;

  • Des cognitions et affects négatifs.

En cas de TSPT, la réaction de peur se déclenche même en l’absence de menace réelle (par ex bruit de voiture qui passe dans la rue). Il s’agit d’une réponse de peur conditionnée (stimulus neutre -> réaction émotionnelle) associée à une altération des capacités de régulation physiologique des émotions.

Le trouble de stress post-traumatique est une pathologie particulièrement fréquente chez les militaires, avec une prévalence estimée entre 35% et 75% selon les études (1).

Au niveau de l’individu, un repérage précoce permet d’une part, de limiter l’entrée dans la pathologie chez les personnels asymptomatiques et, d’autre part, de réduire le risque de chronicisation des symptômes pour les personnels subcliniques (2). En effet, 80 % des TSPT non pris en charge rapidement se chronicisent avec un risque majeur d’addictions et de suicide (jusqu’à 21% de suicide parmi les décès répertoriés chez les militaires) (3).

Actuellement, le TSPT est détecté chez les militaires soit par un entretien avec un psychiatre, soit par des questionnaires remplis en retour de mission. Or, un nombre limité (estimé de 23% à 40% (4)) des soldats présentant des difficultés à la suite d’exposition à des événements traumatiques ont consulté par peur de la stigmatisation. Il apparait donc nécessaire de développer des méthodes de dépistage plus précoces facilitant une prise en charge plus rapide. Ces méthodes doivent aussi être objectives et applicables sur de grands échantillons.

Développer un outil de détection du TSPT basé sur la caractérisation « réponse de peur ».

La technologie de réalité virtuelle est déjà validée pour traiter le TSPT tant chez les militaires (vétérans du Vietnam, de l’Iraq, de l’Afghanistan,) que les civils (accidents de voiture (5) …). Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) cherchent alors à confronter le sujet de manière progressive et répétée au souvenir de l’événement traumatique pour mettre en place le phénomène de déconditionnement. Si D-STRESS s’inscrit dans ce courant, il innove en développant la première solution de détection automatisée et objective du trouble de stress post-traumatique.

Afin de développer l’algorithme de détection, une application de réalité virtuelle est utilisée pour présenter au sujet des stimuli émotionnellement pertinents selon plusieurs modalités sensorielles (vision, odorat, audition) et ainsi déclencher la réponse de peur. Le recueil des données physiologiques (fréquence cardiaque, conductance cutanée, fréquence respiratoire) et comportementales (eye tracking et déplacements) servent au développement du score de détection. Elles sont enregistrées lors de l’utilisation de cette application et non au repos tel que proposé habituellement. À partir de ces données, un score de détection du TSPT est calculé en s’appuyant sur la comparaison de la réponse de peur entre des sujets atteints et des sujets non atteints. Les modèles de risque développés par le CNAM sont utilisés pour déterminer la valeur seuil optimale du score dont la sensibilité et la spécificité permettent de détecter le TSPT même infra clinique.

D-STRESS est un projet d’innovation d’intérêt militaire et civil qui pourra permettre de détecter un TSPT et assurer sa prise en charge plus rapidement.

1 Sundin, J., Fear, N. T., Iversen, A., Rona, R. J., & Wessely, S. (2010). PTSD after deployment to Iraq : Conflicting rates, conflicting claims. Psychological Medicine, 40(3), 367-382. https://doi.org/10.1017/S0033291709990791

Xue, C., Ge, Y., Tang, B., Liu, Y., Kang, P., Wang, M., & Zhang, L. (2015). A meta-analysis of risk factors for combat-related PTSD among military personnel and veterans. PloS One, 10(3), e0120270. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0120270

2 Qualifie les infections qui n'ont pas encore donné de symptômes visibles.

3 Haus Cheymol, R., Boussaud, M., Ollivier, L., Texier, G., Dia, A., Meynard, J.B., Deparis, X., Migliani, R., Spiegel, A., Jougla, E., Verret, C., Berger, F.,Decam, C., Pommier De Santi, V., Nivoix, P., Duron, S., & Mayet, A. (2009). Mortalité dans la population militaire française en activité, 2002-2007. Mortalité dans la population militaire

française en activité, 2002-2007, 44-45, 482-488.

4 Hoge, C. W., Castro, C. A., Messer, S. C., McGurk, D., Cotting, D. I., & Koffman, R. L. (2004). Combat duty in Iraq and Afghanistan, mental health problems, and barriers to care. The New England Journal of Medicine, 351(1), 13-22. https://doi.org/10.1056/NEJMoa040603

5 Difede et al., 2007; McLay et al., 2011; Rothbaum et al., 2001

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