Le mot du Chef d'Etat-major de l'armée de l'Air et de l'Espace

Avec l'essor de nouvelles technologies spatiales et la poussée du secteur privé, l’espace exo-atmosphérique connait de profondes transformations.

Autrefois réservé à un nombre limité d'acteurs étatiques, il est aujourd’hui largement ouvert, car rendu accessible par des coûts plus abordables et des financements privés audacieux : l'introduction de systèmes de propulsion satellitaire innovants, de plateformes bon marché, de lanceurs réduits ou de nouvelles constellations modifient profondément le sujet. Conséquence de ces évolutions, l’espace, dorénavant largement démocratisé, fait partie de notre quotidien par les facilités et usages qu’il nous procure.

Cependant, ces progrès extraordinaires engendrent de nouvelles formes d’intimidations qui compromettent l'utilisation pacifique de l'espace, telle que souhaitée par le traité de 1967. Le développement d’activités telles que l’espionnage entre satellites ou la mise au point d’armes antisatellites sont autant de menaces que la France doit se préparer à affronter, quand elle n’en fait pas déjà l’objet.

Aussi, pour tenir compte de l’accélération de la conflictualité « vers, dans et depuis l’espace », et assurer la protection de ses intérêts nationaux, la France s’est dotée d’une stratégie spatiale de défense en juillet 2019. Rappelant que la liberté d’accès et d’action dans l’espace est cruciale pour garantir notre autonomie stratégique, cette ambition a été déclinée dans une feuille de route articulée autour de quatre axes majeurs que sont :

• l'élaboration d'une nouvelle doctrine pour les opérations spatiales militaires,
• une nouvelle ambition capacitaire, consolidée par la loi de programmation militaire 2024-2030,
• une gouvernance du spatial militaire confiée à l’armée de l’Air et de l’Espace, incarnée par la création du commandement de l’Espace (CDE),
• ainsi que le développement d’une filière professionnelle spatiale au sein de la Défense.

De la surface de notre planète à l’Espace, en passant par la très haute altitude (THA), c’est bien un tout cohérent « Air – THA – Espace » que l’armée de l’Air et de l’Espace s’emploie à aborder de façon continue, active et déterminée.

Le Commandement de l'Espace et la stratégie spatiale de défense

Le Commandement de l’Espace (CDE) a été créé le 3 septembre 2019 pour améliorer l’efficacité opérationnelle, la cohérence, la visibilité et la simplicité de l’organisation et de la gouvernance du spatial de défense au sein du ministère des Armées. Il présente la particularité d’être à la fois un commandement de l’armée de l’Air et de l’Espace et un commandement interarmées. Il comprend à ce titre du personnel de l’armée de l’Air et de l’Espace, de l’Armée de terre, de la Marine Nationale, de la direction générale de l’armement (DGA) et du service du commissariat des armées (SCA). Le CDE reçoit ses directives fonctionnelles du chef d’état-major des armées (CEMA) pour les opérations et la politique spatiale militaire, notamment les capacités spatiales militaires, les coopérations internationales, tandis que le chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace (CEMAAE) en exerce le commandement organique. Porteur de l’expertise spatiale militaire du ministère, le CDE conseille le CEMA ainsi que tous les organismes du ministère ou extérieurs au ministère sur les questions spatiales militaires. En coopération avec de nombreux acteurs, il contribue ainsi à la définition de la politique spatiale militaire et la met en œuvre. Il conduit par ailleurs les opérations spatiales militaires.

Commandement original dans sa forme et ses responsabilités, le CDE incarne la mise en œuvre de la stratégie spatiale de défense et joue un rôle essentiel dans la montée en puissance du spatial de défense, avec l’ensemble des acteurs, au premier rang desquels figure le Centre National d'Etudes Spatiales (CNES).

Une nouvelle ambition capacitaire

Outre celui de renouveler toutes les capacités d’appui aux opérations (communications satellitaires, observation, écoute), le Commandement de l'Espace (CDE) doit relever le défi de construire, avec la direction générale de l’armement (DGA) et le Centre National d'Etudes Spatiales (CNES), et sous l’autorité de l’état-major des armées, une capacité de surveillance de l’espace ainsi qu’une capacité de protection et de défense des intérêts spatiaux de la France. Le programme d’ensemble ARES couvre l’ensemble de ce nouveau champ. Il comprend en particulier l’organisation et l’outillage du commandement et du contrôle des opérations spatiales militaires, véritable colonne vertébrale d’un système de systèmes cohérent et opérationnellement pertinent, en interaction avec les autres milieux mais aussi avec les partenaires civils et militaires, français comme étrangers.  Il comprend aussi la création d’une capacité à réaliser des opérations de proximité en orbite, avec une première expérimentation prévue à l’horizon 2025. Le CDE favorise également le développement de nouveaux acteurs et services spatiaux. Plusieurs projets d’innovation sont ainsi soutenus par son Laboratoire d’Innovation Spatiale des Armées (LISA) en lien avec l’Agence Innovation de Défense (AID), la DGA et le CNES tandis que des contrats de services spatiaux ont été conclus ou sont en gestation avec des opérateurs commerciaux, ouvrant des perspectives de développements pour satisfaire les besoins de la France comme ceux de partenaires étrangers.