[Vidéo] Maître-chien chez les forces spéciales

Direction : Ministère des Armées / Publié le : 09 septembre 2024

Loin d’être de simples mascottes, les chiens apportent une réelle plus-value opérationnelle aux armées. Au commando parachutiste de l’Air n° 10, ils sont des compagnons d’armes hors normes, capables d’être parachutés, d’aider à la neutralisation d’un individu, ou encore de détecter des explosifs. Rencontre avec des binômes très spéciaux.

Le sergent-chef Marco et la chienne Sacha au sein du commando parachutiste de l’Air n°10. © SCH Christian Hamilcaro/DICoD/Défense

« Allez Sacha, on y va ! » Au moment de sortir du chenil de la base aérienne 123 d’Orléans-Bricy (Loiret), le malinois de deux ans ne se fait pas prier. Cela fait une semaine que la chienne n’a pas vu son maître. Il lui a manqué, et elle le fait savoir à grand renfort de sauts et de « léchouilles ». Derrière ce « petit » gabarit de 21 kg très taquin, se cache une athlète de haut niveau. Sacha fait partie de l’élite des chiens de l’armée de l’Air et de l’Espace. Avec le sergent-chef Marco, elle forme un binôme aussi redoutable que redouté au sein du commando parachutiste de l’Air n° 10 (CPA 10), une unité des forces spéciales qui, depuis plusieurs années, a placé le chien au cœur de ses groupes action.

© Ministère des Armées

Aujourd’hui, Marco et ses coéquipiers du groupe 13C participent à un exercice de reconnaissance d’axe. À intervalles réguliers, les opérateurs descendent de leurs véhicules de patrouille, à la recherche d’engins explosifs improvisés ou de tout autre danger. « OK. Appuis en place. Tu peux envoyer le chien », entend-on à la radio. Discrètement, sans japper ni aboyer, Sacha fouille chaque recoin de la route avant de disparaître dans un bosquet. Il suffit de patienter seulement quelques secondes avant d’entendre des hurlements, et le cynotechnicien interpeller son chef de groupe. « Ernest, de Marco. La chienne a repéré un individu. Demande le vert pour m’approcher. » Sacha a en effet découvert un homme armé menaçant et l’a saisi au niveau du bras. Il faut toute la force de son maître pour lui faire desserrer la mâchoire. La chienne est immédiatement récompensée avec l’un de ses jouets préférés, puis réhydratée. Une nécessaire phase de retour au calme avant la reprise de la mission. « Le plus difficile, c’est la réversibilité et l’endurance. On doit maintenant la stimuler à nouveau pour qu’elle continue à traquer d’éventuelles charges explosives », confie Marco.

La chienne Sacha a détecté un individu armé grâce à son flair. © SCH Christian Hamilcar/DICoD/Défense

Une longue formation pour les maîtres

Une des spécificités des chiens des forces spéciales réside dans leur double emploi. « Cela signifie que l’on peut les exploiter à la fois pour du mordant, mais aussi pour la recherche et la détection d’explosifs », ajoute-t-il. Cette particularité nécessite un dressage fin et exigeant, ainsi qu’une longue formation pour les maîtres, presque 18 mois pour être pleinement opérationnels. « L’acculturation aéronautique se fait aussi de manière progressive. On commence à les faire embarquer dans les aéronefs à l’arrêt, puis en vol », raconte Marco. Au fil du temps, il a su gagner en maîtrise grâce au retour d’expérience de ses aînés. « N’hésite pas à temporiser, laisse la chienne travailler », lui conseille le sergent-chef Boq, chef de la cellule cynophile, à l’issue de l’exercice. Des préconisations toujours très écoutées par celui qui n’a intégré la spécialité qu’en 2020, après cinq années passées dans l’unité en tant qu’opérateur qualifié sauveteur au combat de niveau 2. « Désormais, je dois savoir jongler entre ma casquette de commando et celle d’équipier cynophile. Cela implique de ne pas tout le temps m’entraîner avec le groupe pour pouvoir faire travailler le chien. » Cette double compétence fait qu’il peut partir en mission seul ou accompagné. « L’emploi du chien n’est pas systématique car, dans certains cas, notre capacité d’emport dans un aéronef peut être limitée », précise Ernest, le chef de groupe.

Des faits d’armes en opération

Pour autant, l’intervention du chien est parfois déterminante. Ce fut le cas en Afghanistan, à Kaboul, durant le mois d’août 2021. Le sergent-chef Aldo est engagé avec Onyx, son partenaire à quatre pattes, dans le cadre d’Apagan, une opération d’évacuation de ressortissants conduite par les armées françaises. « Notre mission principale consistait à faire de la recherche et de la détection d’explosifs sur toutes les personnes secourues », se rappelle le maître-chien. Sur place, les conditions sont particulièrement difficiles : climats sécuritaire et sanitaire chaotiques autour de l’aéroport, attroupements massifs, bruits de moteur permanents, forte chaleur… mais Onyx n’a pas failli. « Il nous a également permis de nous insérer dans la cohue pour aller chercher une famille qui était aux prises avec les talibans. Le chien a créé un mouvement de foule et il nous a ouvert un chemin », poursuit-il. Ce fait d’armes a valu à Onyx d’être primé aux Trophées des chiens héros, en mai 2023. Une récompense qui n’était pas une première pour l’unité. Avant lui, deux autres chiens du CPA 10 ont également été distingués pour leurs actions au combat.

Mais pourraient-ils un jour être remplacés, par des robots par exemple ? La réponse des spécialistes est sans appel. « Je n’y crois pas du tout. Les machines ne posséderont jamais l’instinct de chasseur que peuvent avoir nos chiens », assène Aldo. L’innovation, oui, mais au profit de l’animal. Il n’est ainsi pas rare de les voir arborer des protections oculaires, très efficaces contre le vent relatif, les éclats ou la poussière à l’occasion des posers en hélicoptère. Ils peuvent aussi porter des petites caméras, sur leur masque ou accrochées à leur harnais. Certains sont même capables de sauter en parachute, à très grande hauteur, sous oxygène, grâce à un masque imaginé et conçu avec le concours des commandos du CPA 10. Comme Onyx et Sacha, ils sont une douzaine de chiens à appuyer ces aviateurs des forces spéciales dans leurs missions les plus risquées, et ils sont considérés comme des équipiers à part entière. « Quand on est à l’étranger, le chien est H24 avec moi et, même quand on est ici à Orléans, il passe son temps dans le bureau avec le groupe », complète Aldo. Leur bien-être est une priorité, tout comme leur suivi médical régulier et leur prise en charge rapide en cas de blessure. « Nous ne partons pas toujours avec des vétérinaires, alors nous sommes formés pour pouvoir agir en cas d’urgence. Je peux, par exemple, poser une perfusion ou faire des points de suture à mon chien », précise Marco. De quoi se rassurer pour leur première opération extérieure ensemble. Départ prévu à la fin de l’année.

Par Samantha Lille.

Les chiens du CPA 10 vivent au rythme des groupes, aussi bien en métropole qu’en opération. © SCH Christian Hamilcaro/DICoD/Défense

Retrouvez le témoignage du sergent-chef Aldo dans le Defcast « Maître-chien chez les forces spéciales »

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